Au milieu des marais salants de Guérande se situe l’atelier de Stone Surfboard, un jeune shaper guérandais prometteur. Portrait d’un artisan passionné et prometteur.
Situé sur une route touristique, l’emplacement de l’atelier de Stone Surfboard doit rappeler des souvenirs aux plus anciens surfeurs et surfeuses de Loire-Atlantique. En effet, Stone réside à deux pas de l’ancien atelier de Hurricane Surfboard, un des premiers shapers professionnels en Loire-Atlantique, parti depuis pas mal d’années dans de lointaines contrées (mais aux dernières nouvelles, de retour sur les terres ligériennes).
Passé ce souvenir historique, l’atelier est matérialisé par une 4L jaune, soigneusement garée devant l’entrée de l’atelier. La voiture des Visiteurs donne le ton, Stone est un shaper unique. Et ses planches transpirent cette unicité.

Une ancienne planche de surf brisée en deux a trouvé une nouvelle vie. Elle met en avant les services de Stone dans un style très 80’s, avec cette déclinaison de fluo caractéristique. La devanture de l’atelier transmet une autre image, le logo Stone, sobre, au design moderne, en deux teintes, tranche radicalement avec cette image 80’s. On sent une certaine dualité dans l’esprit de ce shaper, et ce avant même de pénétrer dans l’antre de cet artisan.
Avant de franchir la porte d’entrée, un détail suscite notre attention : la mise en avant du terme « Doctor surf ». En d’autres termes, la réparation de planches. Une partie importante du travail de Stone, surtout dans une région où le spot le plus proche de l’atelier est un vrai nid à blessures de guerre pour les planches, entre les rochers, les vagues, et la cohabitation de débutants, de supports multiples et de niveaux variés sur un petit espace. Ce détail n’est pas anodin, nous le verrons plus tard, c’est une caractéristique des planches Stone, dures comme la pierre, pour éviter de finir dans son atelier. Un shaper original nous avons dit.
Après une rapide présentation de quelques oeuvres (dont certaines magnifiques) de Stone, ce dernier nous convie à l’observer dans sa salle de glaçage. Une commande est en cours de production. Cette commande est d’ailleurs particulière. En effet, c’est l’une des dernières planches à sortir de son atelier. Stone part en effet dans quelques jours en Australie, parfaire sa technique auprès des meilleurs shapers australiens. Mais nous reviendrons sur cet élément plus tard.
L’artiste change d’atmosphère. Le lieu est marqué par une culture plus urbaine. Aux photos de surf, les murs laissent place à des graffitis.
Les gestes sont précis. La minutie est de mise lors de cette étape qui ne pardonne pas les erreurs. Après une bonne demi-heure de concentration, le glaçage est terminé. La pression redescend. Stone va pouvoir désormais nous en apprendre un peu plus sur sa vie de shaper en Loire-Atlantique.

Pierre Chartier, alias Stone Surfboards
Rennais de naissance, Pierre Chartier alias Stone a rapidement quitté la capitale bretonne il y a 25 ans pour la côte atlantique. Shaper au Pouliguen depuis deux ans exactement, le parcours de Stone à été jonché de rencontres déterminantes.
Cela fait 6 ans que j’ai débuté le surf, avant j’ai fait, il faut l’avouer, du football pendant 15 ans, j’ai changé complètement de voie. Mes amis du coin, m’ont fait découvrir le surf, cela m’a plus tout de suite.
Soucieux d’allier passion et artisanat, Pierre se rend alors compte qu’il y a également pas mal de travail possible dans la région ligérienne pour un shaper. Mais, il lui faut tout apprendre…
J’ai du apprendre à travailler la résine. Dans le coin c’est assez difficile. J’ai eu une opportunité. Un poste s’est libéré chez Sirena Voile, un réparateur de bateaux, catamarans. Cela m’a permis de vraiment d’approfondir le travail de la résine, le poncage, les finitions, le polish.
Pendant ces deux années passées chez Sirena, Pierre commence par se faire la main dans le shape en réparant ses propres planches, puis les planches de ses amis, puis les planches des amis et des amis des amis.

Il se dit alors que c’est le moment de se lancer, qu’il est temps d’ouvrir un atelier de shape et de réparation, vu qu’il n’y en a plus dans le coin depuis x années. Il se lance dans l’aventure.
A la base, on (Pierre et son ami et partenaire dans cet atelier de shape) est parti de rien du tout. C’était une partie du bâtiment qui était abandonné depuis 15 ans. Le bâtiment était donc vide. On a du créer toutes les salles. Faire l’électricité, refaire le sol.Depuis deux ans, j’ai alors essayé de me développer au maximum en shapant des planches qui sortent de l’ordinaire, qu’on ne voit pas partout, surtout dans le coin, puisqu’il n’y a que très peu de shapers.
Le style Stone
Menuisier de métier, Stone garde de ses quatre années à travailler le bois une certaine maîtrise du travail avec le rabot, les ponceuses et le travail des formes. Et cela se voit, notamment dans les détails de ses shapes.
Il faut être minutieux si on veut avoir une outline droite, une planche bien finie. C’est la combinaison de l’apprentissage du bois et de la résine chez Sirena qui m’a permis d’arriver où j’en suis aujourd’hui.
Outre ses qualité de shape, Stone, comme son nom l’indique, met l’accent sur la qualité de fabrication de ses planches, les planches sont solides, résistantes à l’inverse de planches chinoises qu’il répare par palettes entières. Les spots du coin, sauvages et rocailleux, sont une vraie épreuve pour les planches. Et les planches Stone on passés ces tests avec brio. Surfeur local, Stone en profite également pour faire le suivi de ses boards sur les spots locaux.
J’ai eu de très bons retours (sur les planches), même dans le Sud Ouest. Dans toutes les planches que j’ai faite en deux ans, il n’y en a qu’une qui m’est revenue après deux sessions. Il y avait un plug qui s’était arraché complètement. C’était un défaut de fabrication. J’ai dis au gars de ramener la planche, et je lui ai refait complètement.
Les planches chinoises
Dans une région où il n’y a plus ou presque plus de shaper, les planches artisanales ne sont pas les plus représentées. On retrouve donc beaucoup de planches de série, souvent faites en Chine ou dans des contrées lointaines.
Malheureusement, pour ce type de planche, elles coûtent parfois plus cher qu’un shape à la main fait par un shaper qui y mettra toute sa passion.
J’en répare énormément d’ailleurs, car c’est assez fragile, assez light. Je ne les condamne pas. Car c’est des planches pour débuter le surf, à moindre coût. Après au bout d’un an, deux ans; quand on commence à avoir les bases du surf, on peut passer à un shape sur mesure.
L’importance du shaper local et du conseil
Quelle différence existe t-il entre planche de série et une planche sur-mesure ? La différence pourrait venir du conseil et de l’écoute, pour adapter la planche au niveau du surfeur et des spots où il va aller surfer.

Par exemple, en Loire-Atlantique, nous n’avons pas des vagues qui poussent excessivement. Il va donc falloir des planches un peu plus large, un peu plus volumineuse. Les shapes sont également différents, en fonction des performances et des vagues également. C’est au shaper local de justement prendre en compte tous ses facteurs, en plus du niveau du rider.
La question du niveau du rider et l’adaptation à sa demande
Cela m’est déjà arriver de recevoir des clients qui n’avaient jamais fait de surf et qui voulait se prendre une planche neuve. Je les ai conseillés, écoutés, ils sont partis de chez moi sans planche, je les ai envoyé vers d’autres fabricants plus adaptés pour débuter le surf. Les clients repartent satisfait quand même, car je les ai conseillé du mieux que je pouvais, bien écoutés. C’est le genre de clients qui reviendra ensuite pour une répa ou pour un custom.
Pour des clients plus classiques, Pierre à une approche pédagogue pour adapter au maximum la planche par rapport au niveau réel du surfer. D’ailleurs, pour améliorer son propre niveau en surf, mais surtout sa technique de shape, Stone a pris une décision radicale. Il part en Australie pour une durée d’un an (minimum).
Départ pour l’Australie
Le pays du surf, des shapers internationaux, des grands champions et des spots mythiques. Un beau programme pour ce ligérien.
C’est une année placée sous le signe des rencontres. Mon but est de faire connaitre ma marque de planche. De voir si des shapers veulent faire des collaborations avec moi. Si des surfshops sont intéressés par des collabs également. Peut-être que je me développerais à l’étranger. Qui sait ?
Le visa PVT (Permis Vacances Travail) australien durant 1 an, Pierre projette également de profiter de voyage pour améliorer son surf et visiter d’autres coins sympas à proximité de l’Australie. Finalement, il partira peut-être plus qu’un an dixit le principal intéressé. Cependant, une chose est certaine, il reviendra toujours dans le coin, ce territoire qui lui a permis de forger cette nouvelle vie.
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